Anne-Marie Lizin était une femme politique d’avant-garde par sa vision de la liaison entre le combat pour l’émancipation de la femme et la géopolitique.
Elle était « au-delà du féminisme » en considérant, pour l’exprimer d’une façon schématique, que, seule, la participation active des femmes à la vie politique, dans toutes les sociétés, était à même de conduire à la résolution de conflits perpétués, comme à plaisir, par les pouvoirs dominés par les hommes.
Elle a toujours senti, su, que l’inégalité entre les hommes et les femmes naissait dans la famille, dans le village, dans la tribu, qu’elle se perpétue et se renforce par les traditions, valorisées par les religions et, plus encore, par les clergés.
Sa réflexion était profonde, maximisée par un étonnant « ressenti » émotionnel, Même si son intelligence était vive et son analyse aussi rapide que lucide, Anne-Marie Lizin était tout sauf une pure « intellectuelle ». Toute sa vie en est l’illustration : c’était une femme d’action – de multiples actions, peut-on dire, tant les luttes dans lesquelles elle s’est impliquée sont nombreuses.
Elle ne supportait pas l’immobilisme. Il fallait que « cela bouge », ce qui impliquait, par ailleurs, de « comprendre » les ennemis de ses conceptions, donc de les rencontrer.
Cette volonté d’agir explique son acceptation des compromis – à la condition qu’ils fassent progresser ses idées et ses principes, dont elle n’a jamais dérogé – mais aussi son goût pour la « diplomatie parallèle ». Si elle énervait bon nombre de diplomates et de ministres – autant qu’elle en ravissait d’autres – cette façon de faire a souvent participé à l’émancipation de la femme, tout en servant la cause de la paix.
Anne-Marie nous a quittés. Nul n’est irremplaçable. Sauf elle. La Fondation Anne-Marie Lizin n’a pas la prétention de s’y substituer. Qui aurait l’énergie et la capacité de travail et de mobilisation qui l’ont toujours animée ?
Mais les priorités qui ont guidé la vie d’Anne-Marie sont plus que jamais d’actualité. Certaines, comme sa conception ouverte du monde, vivent, aujourd’hui, des moments difficiles. Anne-Marie n’a jamais travaillé seule. Ses amies, ses amis, ses complices poursuivent tous les combats qui étaient sa raison de vivre.
Le minimum que la Fondation Anne-Marie Lizin puisse faire est de se mettre à la disposition – et de participer aux combats – de toutes ces femmes et de tous ces hommes épris de liberté, d’égalité et de solidarité.
Si vous en êtes, rejoignez-nous !
Ci-dessous, le texte placé en illustration de la photo d’Anne-Marie qui a été exposée, en juin et juillet 2017, au Musée du Grand Curtius, à Liège, à l’occasion de l’exposition « Galerie de Femmes Remarquables » mise sur pied à l’occasion des 70 ans du Soroptimist Club de Liège :
Anne-Marie Lizin a été la première femme élue à la Présidence du Sénat de Belgique. Elle a consacré sa vie politique – qui était toute sa vie – d’une part à sa ville natale de Huy, qu’elle adorait par-dessus tout, d’autre part à l’égalité entre les sexes et, plus précisément, à l’émancipation de la femme.
Auteure de la toute première loi belge réprimant la violence conjugale, Anne-Marie Lizin savait que le combat contre la mainmise de l’homme sur la femme se niche autant dans les familles, les tribus, les traditions – qu’elles soient ou non religieuses – que dans les hémicycles.
Cette certitude l’a conduite à développer une intense activité géopolitique axée, en priorité, vers les Etats où les droits de la femme sont malmenés ou inexistants. Elle y soutenait toutes celles et ceux, tous les groupes, qu’ils soient ou non au pouvoir, qui se battaient – et se battent toujours, dans des conditions souvent difficiles – pour la liberté de la femme.
© photo - Sophie Deneumostier